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Sheila, Sylvie Vartan et Françoise Hardy: que sont devenues les idoles des yéyés ?

Il y a soixante ans, une vague yéyé secouait l’Hexagone. De Johnny Hallyday, à Sylvie Vartan, en passant par Françoise Hardy et Salvatore Adamo, ces jeunes chanteurs sont devenus de véritables phénomènes artistiques. Mais avec le décès de l’Idole des jeunes et le retrait progressif des icônes de cette génération, une page de l’histoire de la musique française semble se tourner pour laisser place à une autre. Explications.

Début des années 1960. Un air de liberté s’empare des juke-boxes et des postes de radio. La jeunesse se déhanche au rythme du twist, qui a traversé tout l’Atlantique. La génération yéyé, comme la surnomme le sociologue Edgar Morin, secoue alors tout l’Hexagone. Cette pop adolescente, inspirée de tubes anglo-saxons souvent repris et traduits en français, est portée par Johnny Hallyday. En troquant son blouson noir, ce fan incontournable d’Elvis Presley et de l’Amérique devient à cette époque un phénomène à seulement 17 ans. “C’était le leader de la génération”, rappelle le journaliste Jean-Luc Geneste à Gala.fr. “C’était le plus populaire, celui qui vendait le plus de disques. C’était vraiment l’Idole des jeunes”.

Tout comme Johnny Hallyday, Sylvie Vartan, Françoise Hardy, Eddy Mitchell, Salvatore Adamo ou encore Sheila font partie intégrante de cette grande révolution musicale. “C’était une génération d’adolescents qui ont véritablement marqué le début d’une nouvelle ère”, souligne Jean-Luc Geneste en se remémorant la photo iconique rassemblant 46 vedettes yéyé de l’époque prise par Jean-Marie Périer, le 12 avril 1966. Mais avec la mort de Johnny Hallyday, en 2017, et celle de France Gall, en 2018, une page s’est doucement tournée. “Ces décès ne marquent pas la fin d’une époque puisqu’elle est révolue depuis longtemps. Il faut savoir que les années yéyés n’ont pas duré très longtemps. C’est surtout la fin de ceux qui ont fait cette époque”, souligne Jean-Luc Geneste à Gala.fr. Et de poursuivre : “C’est la fin d’une génération dorée qui tire peu à peu sa révérence.” Un avis partagé par Daniela Lumbroso : « C’est la fin de la génération yéyé au présent et c’est le début de la génération des yéyés en patrimoine. »

Un dernier tour de piste pour les icônes yéyés

Ces dernières années, des légendes des années yéyé ont fait part de leur décision de raccrocher le micro. En 2011,Eddy Mitchell offrait à son public une dernière tournée en solo sous le signe d’une Dernière séance. N’ayant « plus la patience des tournées », comme il le confiait sur les ondes de RTL en novembre 2022, l’interprète de Couleur menthe à l’eau craignait de « faire la tournée de trop, et surtout de le faire sans passion ». De son côté, très affaiblie par la maladie et n’étant plus en mesure de chanter, Françoise Hardy a préféré se retirer. “Ça ne me tourmente pas. J’ai écrit tellement de bons textes que mon petit filon est sans doute épuisé”, confiait-elle dans les colonnes de Paris Match, en mars 2021. Un style qui a fait d’elle une véritable icône, comme le souligne Daniela Lumbroso. « C’est un talent fou d’auteur, une exigence absolue de soi-même et une vraie beauté. » Il en est de même pour Jacques Dutronc, qui a formé un couple mythique avec l’interprète de Comment te dire Adieu. Après un come-back surprise, le temps d’une tournée exceptionnelle au côté de son fils Thomas Dutronc, le chanteur de 80 ans a décidé de se retirer de la scène. “Ça s’arrête parce que mon père préfère arrêter maintenant. C’est son genre de ne pas en faire trop, il préfère se faire rare et tout ça. (…) Il s’inquiète de ne pas tenir le coup”, commentait l’unique enfant de Françoise Hardy et Jacques Dutronc sur les ondes de RTL, en décembre 2022.

Et un autre chapitre est sur le point de s’achever. Après 60 ans de carrière, Sylvie Vartan a décidé de faire ses adieux à la scène à l’occasion d’une dernière tournée intitulée Je tire ma révérence. Une décision sur laquelle l’ex-femme de Johnny Hallyday est longuement revenue lors de son passage sur le plateau de Quotidien, le 23 janvier dernier. “J’ai été très privilégiée d’avoir des longs moments merveilleux que j’ai partagés avec le public”, expliquait la mère de David Hallyday. Et de conclure : “C’est aussi une question de respect pour les gens. Les années passent et il faut savoir partir sans force, sans voix, ça c’est triste je trouve”. Un choix qui marque un nouveau tournant dans l’histoire de la variété française. “Comme Françoise Hardy, elle est une icône de la chanson française depuis 60 ans. Cette tournée est donc comme le point final de cette époque”, explique Jean-Luc Geneste. Pour le journaliste, cette tournée d’adieux est “une façon de vivre une dernière fois ce grand bonheur avec le public” que la chanteuse a connu dès ses 16 ans. “Je pense que c’est une dernière petite décharge d’adrénaline qu’elle veut se donner. Sylvie Vartan sait que c’est maintenant ou jamais.”, souligne Jean-Luc Geneste. Pour Daniela Lumbroso, cette tournée d’adieux n’est peut-être pas une fin en soi. « Peut-être qu’elle aura envie de jouer un super rôle au cinéma ou qu’elle fera un documentaire sur elle à la télévision. Ça ne veut pas dire qu’elle arrête tout », ajoute la productrice d’émissions de variétés.

Et bien qu’il ne fasse pas partie de cette bande, un autre chanteur ayant fait ses débuts en 1964 a officiellement annoncé sa retraite. Ce dimanche 11 février, jour de ses 81 printemps, Serge Lama a déclaré qu’il ne remonterait plus sur scène sur le canapé rouge de Michel Drucker dans l’émission Vivement dimanche. Bête de scène durant sa carrière, l’interprète de Je t’aime à la folie ne souhaite pas que ses fans gardent de lui l’image d’un chanteur diminué. “Je refuse de montrer au public quelque chose pour lequel il ne vient pas”, déclarait-il sur le plateau de l’émission C à vous, le 25 janvier dernier sur France 5. Un choix que comprend Daniela Lumbroso : « Depuis l’accident de voiture qu’il a eu quand il était jeune, il a toujours été traité et a toujours souffert. Je pense qu’il a eu une vie difficile en terme de santé. Il n’a donc pas envie qu’on le voit comme ça ».

Les derniers représentants de cette génération

Depuis 1962, Sheila fait partie de la vie des Français. Icône yéyé grâce à son titre L’école est finie, la chanteuse ne souhaite, quant à elle, pas entendre parler de la retraite. “Ce mot est banni de mon vocabulaire, il signifie pour moi la fin des haricots. Moi, je fête mes anniversaires et je chante, toujours et encore”, confiait-elle dans les colonnes de Gala en octobre 2022. Et pour cause, la scène est sa raison de vivre. “Lorsque j’ai perdu mes deux parents à seize jours d’intervalle en 2002, alors que je fêtais mes quarante ans de carrière, j’ai tenu mes engagements. Lorsque mon fils Ludovic est mort en 2017, j’ai quand même chanté un mois plus tard. Ça m’a tenue debout”. Pour Jean-Luc Geneste, l’artiste de 78 ans est “infatigable”.

À 94 ans, Hugues Aufray continue lui aussi de tenir bon la barre. Le 14 janvier 2024, l’interprète de Santiano a fait danser l’Olympia pour le plus grand bonheur de son public fidèle, ravi de redécouvrir le répertoire bien fourni de l’artiste. Interrogé par Le Parisien à la suite de ce nouveau succès, le mari de Murielle avait annoncé qu’il était prêt à repartir en tournée. “Je fais seulement de la musique, je joue de la guitare tous les jours. Je n’ai aucune raison d’arrêter les concerts. Ça m’amuse beaucoup. Tant que le public suit et que je peux tenir deux heures de spectacle…”, assurait-il. De quoi susciter l’admiration de Jean-Luc Geneste. “Étonnamment Hugues Aufray, c’est le plus frais et le plus en forme de tous”, note-t-il avec amusement. Avant d’apporter une petite précision : “Bien qu’il soit associé à cette génération, Hugues Aufray ne chantait pas vraiment le yéyé. Il avait un répertoire folk avec ses reprises de Bob Dylan. Pour autant, il était bien présent sur la photo de Jean-Marie Périer. Quand les autres avaient 20 ans, il n’avait pas loin de 35 ans. Il avait cette image de grand frère.”

Cette passion pour la scène anime toujours autant une autre figure de cette époque : Salvatore Adamo. S’il a récemment été contraint d’annuler certaines dates de ses concerts, suite à des problèmes de santé, l’artiste de 80 ans n’est pas prêt à faire ses adieux à son public, toujours au rendez-vous depuis soixante ans. “Il ne veut pas lâcher le morceau. En plus, il chante tout son répertoire des années 60, ce que ne faisait pas forcément Johnny. Les gens attendent qu’il chante Tombe la neige et ses chansons des époques yéyés”, affirme Jean-Luc Geneste.

Un héritage musical : des yéyés à la nouvelle génération

Bien qu’une page semble doucement se tourner, les années yéyé restent empreintes d’un profond sentiment de nostalgie qui fait d’elles une époque intemporelle voire immortelle. Malgré les disparitions de Johnny Hallyday et de France Gall, et le retrait de certaines figures yéyés, leurs grands succès continuent de traverser les générations. “Il nous reste quelques chansons comme La plus belle pour aller danser de Vartan, Poupée de cire, poupée de son de Gall et Retiens la nuit de Hallyday. Elles sont empreintes de nostalgie. On sent qu’elles parlent d’une époque qui est très lointaine et révolue. Ce sont des vieux dont on garde une image de jeunesse, c’est là toute la contradiction », analyse Jean-Luc Geneste. Et de rebondir : “Pendant une dizaine d’années, il y a eu les tournées Âge tendre et tête de bois. Ça a remis un petit peu cette époque au goût du jour. Partout en France, ça a fait salle comble avec des chanteurs qu’on a parfois complètement oubliés”.

Six décennies après cette bourrasque musicale, les Français restent donc profondément attachés à ces chanteurs qui ont marqué au fer rouge l’industrie musicale. « Pour la plupart de ces artistes qui ont éclos dans les années 1960, notamment pour Johnny Hallyday ou encore de France Gall, il y a eu des moments de revival. À un moment vous êtes la génération qui monte, puis vous êtes maîtrisé par la génération suivante, pour être ensuite adoré par la génération des petits-enfants », analyse Daniela Lumbroso. Un bagage musical qui est sur le point d’être perpétué par la nouvelle scène musicale. “Je trouve que cette génération disparaît car la relève est déjà très présente. Pour moi, Vianney est aussi puissant que Berger ou Goldman. Clara Luciani, Juliette Armanet ou même Zazie sont les équivalents de ce qu’ont pu être d’autres auteurs-compositeurs. La relève est bien là ! », assure l’ancienne animatrice de France Télévisions. Et de conclure : « Je vois qu’il y a une vraie demande du public pour de la nouveauté et des artistes différents. Ils sont à vraiment la relève ». Une nouvelle ère commence.

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