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Dois-je empêcher mon enfant de s’asseoir en W ?

Pour jouer, il s’installe au sol genoux à l’avant, pieds écartés à l’arrière de son corps. Une position dite en W, souvent adoptée par les enfants, souvent décriée. Elle aurait des méfaits sur le développement : musculature moins développée, marche les pieds en dedans, problèmes d’équilibre… la liste est longue. Rumeur, ou fait avéré ? Nous avons interrogé deux kinésithérapeutes et un chirurgien orthopédiste pédiatre.

Pour l’adulte, elle ne semble pas vraiment confortable. L’enfant, lui, avec sa souplesse naturelle, peut aisément adopter cette drôle de position. Observez la forme de ses jambes, par terre : elles tracent une ligne brisée, s’apparentant à la lettre W. Les genoux sont à l’avant du corps, serrés ou écartés. Les mollets partent vers l’extérieur, les pieds à l’arrière.
Une manière courante de s’asseoir

Le W et “ très utilisé par les enfants avec une pathologie neurologiques (paralysie cérébrale), qui souffrent d’hypotonie ou d’hypertonie musculaire ”, détaille Claire Perol, kinésithérapeute spécialisée en pédiatrie.

Mais nombreux sont les enfants sans problème de santé spécifique qui l’apprécient, dès l’âge de 2 ou 3 ans, “ et parfois très tôt, avant 1 an ”. Elle offre plus de stabilité que les autres positions assises. Ils peuvent se mettre en W de façon transitoire, pour passer d’une posture à une autre (des genoux au sol, par exemple), ou s’y asseoir de façon plus durable, lors de temps de jeu ou de lecture.

Face à cette position surprenante, on peut s’interroger sur les effets corporels. Et les avis de professionnels diffèrent.

Les craintes sur le développement

Les kinésithérapeutes interrogés prennent en compte la fréquence. “Si la position W reste transitoire et ponctuelle, elle ne pose pas problème ” reprend Claire Perol. “ Elle a tendance à disparaître spontanément”, ajoute son confrère Guillaume Collet.

En revanche, à haute dose, lorsque l’enfant passe beaucoup de temps assis de cette manière, des objections se soulèvent. ” En W, les hanches sont en rotation interne, explique Claire Perol. Avec les années, on peut craindre une excentration, ainsi qu’une asymétrie musculaire. Des pathologies invisibles à l’œil nu. ”

Guillaume Collet, lui, précise: ” Aucune étude ne montre qu’elle abîme les hanches. Mais, lorsque le W est adopté à longueur de journée, je suis d’avis qu’elles peuvent se former d’une manière qui n’est pas celle qu’on attend. La position crée une contrainte au niveau des ligaments et il est possible qu’elle crée des instabilités. ”

Des effets à relativiser

Le Dr Saad Abu Amara, chirurgien orthopédiste pédiatre, n’est pas entièrement de cet avis et se veut rassurant. “ Il s’agit une position classique, variante de la normale, qui n’est pas mauvaise en soi. Elle est causée par une antéversion fémorale exagérée banale chez le jeune enfant. ”

Les fémurs, os de la cuisse, sont naturellement vrillés vers l’intérieur, chez de nombreux enfants dès la naissance. Ce qui explique également la marche avec les pieds en dedans. Le spécialiste considère la position W comme la manifestation de cette torsion fémorale exagérée et non la cause.

L’Institut International de la Dysplasie de la Hanche va dans le même sens, affirmant que “ chacun de nous a des différences dans la forme du corps ”, et qu’en grandissant l’antéversion disparaît “ naturellement pour 99 % des enfants ”. Les autres (1 %) doivent subir une intervention chirurgicale. L’institut disculpe la position W dans les problèmes de hanche et ne recommande pas aux parents de l’interdire.

L’Hôpital pour enfants de Seattle tient un discours identique, dans une brochure éditée sur le sujet. On y lit par ailleurs que s’asseoir en tailleur peut être inconfortable pour certains enfants avec une torsion fémorale.

Proposer d’autres positions

Néanmoins, les kinésithérapeutes avancent aussi le problème du développement moteur.

“ En W, l’enfant sollicite peu son tronc, explique Guillaume Collet. Concernant la motricité, c’est dommage en terme de richesse d’expériences. ” Pour favoriser ses mouvements, vous pouvez le guider physiquement, puis verbalement, afin de lui montrer d’autres façons de s’asseoir. Avec les jambes tendues devant, en tailleur, en sirène (jambes repliées sur le côté), sur une chaise avec un coussin déstabilisant… “ Mais ne le dérangez pas s’il est en train de réaliser une activité lui demandant beaucoup de concentration (motricité fine notamment, par exemple mettre des perles sur un cordon). La position W lui apporte de la stabilité. ”

Ces propositions devraient intervenir “ dès l’âge où l’enfant automatise sa motricité assise, donc entre 8 mois et 2 ans environ ”, conseille Claire Perol. Le W pouvant refléter un manque de tonus musculaire, pensez aussi à stimuler la “ motricité globale, en ne le laissant pas dans un transat ou un parc ”.

Consulter en cas de doute

Si vous constatez, en parallèle, que votre enfant présente des difficultés pour se déplacer, parlez-en à votre pédiatre ou au médecin généraliste.

Le Dr Saad Abu Amara recommande une consultation chez un spécialiste si un pied tourne plus que l’autre, si l’enfant n’arrive pas à corriger de lui-même la rotation interne du membre ou s’il ressent une douleur lorsqu’on lui demande de tourner les jambes vers l’extérieur.

Un traitement de la torsion fémorale ne sera nécessaire “ que si un côté est davantage marqué, où dans le cas d’une persistance après l’âge de 12 ans dans certaines formes très importantes ”. Mais pour la grande majorité des enfants, il n’existerait aucune raison de vous inquiéter outre mesure face à une position W.

Source : doctissimo.fr

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