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« JE N’AI PLUS DE VIE »: INFESTÉS PAR LES PUNAISES DE LIT, CES FRANÇAIS SE SONT COUPÉS DU MONDE EXTÉRIEUR

Au delà des habitations, les punaises de lit prolifèrent ces dernières semaines dans les lieux publics comme les cinémas, les transports en commun ou les bibliothèques. Si ces nuisibles ne transmettent pas de maladies à leurs hôtes, ils engendrent d’importantes nuisances. Des victimes de punaises de lit racontent à BFMTV.com comment ces petits envahisseurs ont saboté leur santé mentale… au point de les isoler du reste du monde.

« C’est un cauchemar sans fin, je n’ai plus de vie ». Émilie, en arrêt de travail à cause d’une invasion de punaises de lit qui sévit chez elle depuis février, lance un appel à l’aide sur un groupe de victimes sur Facebook. À cause de ces envahissants nuisibles, la quadragénaire originaire de Digne-Les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence) est tombée dans une « profonde dépression », au point de s’isoler socialement. Elle est aujourd’hui suivie psychologiquement.

« Comment faites-vous pour rester positifs? », demande-t-elle, désespérée, sur ce groupe d’entraide. « Je suis au bout du rouleau. Je ne pense qu’à ça, je ne m’autorise plus rien… Ces bestioles ont pris le contrôle de ma vie… », raconte cette femme, qui a jeté tous ses meubles et mis toutes ses affaires sous scellé pour éviter la prolifération.

Depuis le printemps, elle confie « ne plus oser sortir de chez elle, ou uniquement pour amener ses enfants à l’école » par peur de contaminer d’autres lieux.

« J’ai l’impression que l’on va en transporter partout », se décharge-t-elle, gênée.

Le poids « des idées préconçues »

De la même manière, Robin a fait le choix de ne pas en parler à beaucoup de monde lorsque son petit appartement de 28m² a été infesté par les punaises de lit cet été. « Je l’ai seulement dit à une petite poignée de personnes de confiance », explique le jeune homme de 25 ans, qui vit à Arcueil (Val-de-Marne). Ce qui se résume à ses parents et ses trois meilleurs amis.

« J’avais peur qu’on me juge. Je savais bien quelles étaient les idées préconçues autour des punaises de lit: on pense tout de suite que c’est lié à la saleté… du moins c’est une idée qui trotte dans la tête des gens. Je n’avais pas envie qu’on me prenne pour quelqu’un qui manque d’hygiène, ou que certains de mes amis décident d’arrêter de me voir à cause de ça », confie-t-il encore.

La propagation des punaises de lit, pourtant, n’a pas de lien avec un quelconque manque d’hygiène. Extrêmement résistantes, elles se déplacent en réalité d’un habitat à un autre en se cachant dans les sacs ou valises des voyageurs mais elles ne sautent et ne volent pas. Selon la société de détection canine Éco-Flair, spécialiste de la question, il est donc très peu probable de transporter une punaise de lit sur soi.

« L’impression d’être un pestiféré »
Depuis, le jeune homme ne s’autorise plus à inviter chez lui, alors qu’il avait l’habitude d’organiser des soirées dans son appartement. « On se restreint beaucoup quand ça nous arrive. Même si le risque d’en transporter est faible, dès qu’on sort dans un lieu public on y pense », témoigne Robin, qui s’est parfois senti comme « un pestiféré ». Pendant son stage de fin d’études, le jeune homme a préféré garder ça pour lui, par crainte d’être jugé par ses collègues.

C’est aussi ce qu’avait choisi de faire la jeune Lola, 17 ans, au sein de son lycée professionnel, jusqu’au jour où un professeur lui a fait une remarque sur sa tenue, pas adaptée à sa formation d’hôtellerie, sans savoir que la garde-robe de l’adolescente était intégralement entassée dans des sacs poubelle massés chez elle à Bar-Le-Duc (Meuse), dans la seule chambre non contaminée par les punaises de lit.

« Quand je lui ai confié que nous étions contaminés par les punaises de lit, il ne m’a pas crue! », s’étonne encore la jeune fille, qui a dû solliciter l’aide de sa mère pour sensibiliser le professeur.
Au lycée, Lola aussi évite d’ébruiter la nouvelle pour « ne pas se faire une réputation ». « C’est un peu la honte, et les rumeurs vont vite dans mon établissement! Du coup j’évite d’être collée aux gens », souffle l’adolescente, frustrée de ne pas avoir accès à ses affaires, et de devoir porter la même tenue 3 voire 4 jours par semaine pour éviter de contaminer tous ses vêtements.

Un chez-soi entièrement placé sous scellé
Sa mère, constamment sur ses gardes, passe son temps à nettoyer l’appartement de fond en comble et elle n’a pas fermé l’oeil depuis la découverte de ces nuisibles il y a un mois. Elle et ses trois enfants (âgés de 3, 14 et 17 ans) dorment tous les quatre sur le même canapé-lit, qu’elle entoure scrupuleusement de scotch double-face pour piéger les insectes, et de poudre de diatomée pour les éloigner la nuit. Angèle laisse même la télévision allumée 24H/24 dans l’espoir que les punaises ne sortent pas en voyant de la lumière.

Ce qui a pour conséquence de fortement perturber le sommeil de son plus jeune fils, qui a tendance à s’endormir au milieu de sa classe depuis la rentrée scolaire. « J’ai prévenu sa maîtresse qu’on vivait une période difficile, mais pas plus », raconte cette femme de 38 ans, qui passe au peigne fin et à la vapeur toutes les affaires de ses trois enfants chaque soir et chaque matin avant l’école. Et au centre social où elle travaille en tant que bénévole, Angèle Lalande n’ose plus s’asseoir sur les chaises en tissu.

« Ça joue sur toute notre vie. Honnêtement j’ai l’impression de devenir folle. Je me sens impuissante. Le pire c’est que j’ai l’impression d’en voir partout, la nuit j’ai la sensation qu’elles me grimpent dessus alors que parfois il n’y a rien », décrit-elle.

Angèle Lalande ne cache pas qu’elle « pleure beaucoup ». « Ça nous pousse à bout. On n’a plus du tout une vie normale: on n’ose plus aller chez les gens, on s’est complètement isolé du monde extérieur. La nuit je surveille mes enfants comme une cinglée, lampe de poche à la main, pour ne pas qu’ils se fassent piquer. Tandis que la journée je leur crie dessus dès qu’ils sortent leurs affaires ou ne respectent pas le protocole. J’ai aussi recouvert les sièges de voiture de toiles de tente ».

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