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Vider la maison d’un proche : 7 erreurs à éviter

Cette tâche douloureuse peut se transformer en épreuve supplémentaire en cas d’impairs avec le notaire, le brocanteur ou l’agent des impôts… Suivez le guide !

Vider le logement d’un proche disparu ? Cela peut paraître insurmontable, surtout quand s’agit de le faire en urgence avant une vente ou pour arrêter de payer le loyer. « Il faut du courage pour laisser partir les souvenirs. De la méthode, pour trier. Et beaucoup d’énergie, pour s’attaquer aux montagnes d’objets », prévient Françoise, qui vient de débarrasser la villa bretonne de ses parents en cinq week-ends. Évitez aussi les bévues qui font perdre du temps, de l’argent ou créent des frictions avec les autres héritiers. Sans parler des démêlés avec le fisc !

1. Oublier l’inventaire obligatoire

Un inventaire des biens est obligatoire si un héritier est mineur (ou sous curatelle ou tutelle), si la succession est acceptée seulement à « hauteur de l’actif net » (soit après déduction des dettes) ou si les héritiers ne souhaitent pas déclarer le mobilier pour la valeur forfaitaire de 5 % de l’actif successoral (avant déduction du passif) dans la déclaration de succession pour payer moins de droits de succession. « Ce dernier cas est fréquent, surtout en région parisienne car le prix du mobilier atteint rarement 5 % de la valeur des logements », note Myrtille Dumonteil, commissaire-priseur judiciaire à Paris. Prenez Jeanne et Georges, seuls héritiers de leur tante, qui laisse un F3 dans le 9e arrondissement parisien, estimé à 800 000 € mais chichement meublé. En payant les droits de succession sur la valeur réelle du mobilier – estimé à 5 000 € – plutôt que sur le forfait de 5 % (40 000 €), ils économisent 19 250 € (les fonds transmis de tante à neveux sont taxés à 55 %). En pratique, le notaire se rend chez le défunt avec un commissaire-priseur (sauf exception, par exemple s’il n’y en a pas dans la commune) qui donne un prix à chaque objet (c’est la « prisée »). Le résultat est consigné dans un acte « authentique », rédigé par le notaire et signé par les héritiers. Côté frais, comptez 250 à 400 € par demi-journée pour le commissaire-priseur (si c’est le notaire qui valorise les biens, ses frais sont réglementés) plus 400 € d’émoluments pour le notaire et les droits d’enregistrement. « Si l’ambiance entre ayant-droits est tendue, n’hésitez pas à faire réaliser un inventaire même s’il n’est pas obligatoire : cela évitera les discussions sans fin sur la valeur de tel ou tel bibelot pour constituer les lots, précise Myrtille Dumonteil. Vous n’acquitterez alors que les frais du commissaire-priseur, car un acte ‘authentique’ n’est pas nécessaire ».

2. S’arroger des biens incognito

Sa bague de fiançailles, votre mère vous l’avait promise. Et vous vous êtes beaucoup occupée d’elle ces dernières années. Alors pourquoi ne pas s’approprier le bijou discrètement, plutôt que de l’inclure dans le partage et de régler des droits de succession en sus ? « Mauvaise idée : toute tentative de s’arroger incognito une part d’héritage peut être qualifiée de ‘recel successoral’, même

si le défunt était à l’initiative de la démarche. Si les autres héritiers vous prennent la main dans le sac, vous pouvez perdre tout droit sur les biens dissimulés. Et en justice, être condamné à leur acquitter des dommages et intérêts ainsi qu’à leur rembourser les frais de procédure », met en garde Me Olivier Wielblad, avocat au barreau de Paris.

3. Déménager à la va-vite avant la visite du notaire

Au vu de ses dettes, vous n’êtes pas certain d’accepter la succession de votre proche ? Alors, ne vendez ou ne donnez surtout pas ses meubles, vous seriez réputé d’office avoir accepté la succession, et ne pourriez plus l’accepter « à concurrence de l’actif net » ou la refuser (ces options protègent votre patrimoine des dettes du défunt). Autre situation ? Vous ne souhaitez pas déclarer les meubles pour 5 % de la succession et avez prévu un inventaire pour les lister et les valoriser. Avouez-le, vous êtes tenté de vider l’essentiel du logement avant le passage du notaire pour limiter la valeur taxable ? Prudence : si l’appartement compte trop peu de meubles, vous attiserez la méfiance du fisc, qui peut appliquer d’office le forfait de 5 %. « Si votre proche avait assuré certains objets contre le vol ou les détériorations, l’administration peut en retrouver la trace via la compagnie d’assurance », ajoute Myrtille Dumonteil. Enfin, si vous vendez des biens aux enchères publiques dans les deux ans, le fisc pourra vous redresser sur la valeur de vente.

4. Ne pas faire estimer les objets de valeur

Alors ce tabouret, une vieillerie à 5 € ou un Le Corbusier à 2 000 € ? Nombreux sont ceux qui vident un logement sans faire réaliser aucune estimation, ou qui se contentent de faire passer le brocanteur du coin. Le hic ? Ces pros rachètent meubles et bibelots pour une bouchée de pain, même s’ils savent pouvoir les revendre beaucoup plus cher. Mieux vaut solliciter l’un des 430 commissaires-priseurs de l’Hexagone (annuaire sur interencheres.com). Mission de service public oblige, ces officiers ministériels délivrent une estimation orale gratuite. Idem si on les sollicite par Internet (avec des photos) via estimation.interencheres.com ou le site de Drouot (drouot-estimations.com). Si vous êtes trop éloigné, ou les objets trop encombrants, le commissaire-priseur peut aussi se déplacer. « Les croyances familiales sont souvent fausses ! Il m’est arrivé de venir estimer un tableau tenu pour le trésor de la famille – et qui ne valait finalement pas grand-chose – et de découvrir sur une étagère une coupe libatoire en corne de rhinocéros estimée à 30 000 €, que les héritiers prenaient pour une babiole », se souvient Myrtille Dumonteil. Si le commissaire-priseur ne déniche rien de valeur, il ne facture souvent que des frais de déplacement. Si des objets sont intéressants, il offre l’estimation si vous lui en confiez la vente (il perçoit 15 à 22 % de commission en salle des ventes). Enfin, s’il estime sans vendre, il facture 250 à 400 € la demi-journée, comme pour un inventaire.

5. Organiser un vide-maison « sauvage »

Organiser votre marché aux puces maison dans le jardin ou l’appartement ? Le concept fait fureur : selon Olivier Nass, fondateur du site vide-maisons.org, 10 500 « vide-maisons » se sont tenus en France en 2019 ! On se débarrasse ainsi du maximum d’objets sans les transporter. Idéal, à condition de connaître les règles pour ne pas voir la police interrompre la vente (on risque jusqu’à 15 000 € d’amende). « Les formalités varient : il suffit souvent de se signaler à la mairie 15 jours avant, avec possibilité d’étaler l’événement sur deux jours ou sur deux week-ends », précise Olivier Nass. Annoncez la vente par une pancarte le plus tôt possible et faites paraître une annonce gratuite sur vide-maisons.org. Le jour J, ne soyez pas seul – au moins une personne par pièce si vous laissez les badauds entrer –, regroupez et surveillez les objets de valeur et prévoyez de la monnaie (ne déballez rien sur le trottoir, sous peine d’amende).

6. Tout donner à un « débarrasseur gratuit »

De nombreuses entreprises se proposent de débarrasser tout un logement, gratis, sous réserve que l’on n’ait pas enlevé meubles et bibelots. Mais êtes-vous bien certain de ne pas avoir oublié un trésor dans le fouillis ? Mieux vaut faire un vrai tri, puis appeler un débarrasseur classique (45 à 75 € le mètre cube). Autre idée pour éviter les allers-retours à la déchetterie ? « Commandez une benne de 7, 15 ou 30 mètres cubes qui sera déposée dans votre jardin (ou devant chez vous, moyennant une autorisation de la mairie facile à obtenir), puis enlevée le jour de votre choix », détaille Antoine Le Feuvre, directeur digital recyclage chez Suez (commande via valoservices.suez.fr ou au 09 69 32 10 10, prévoir 300 à 600 € selon le volume). Pour éviter de transporter vos encombrants, vous pouvez enfin publier une annonce sur donnons.org : en 2019, plus de 281 000 objets y ont fait des heureux !

Merci à Myrtille Dumonteil, commissaire-priseur judiciaire, Art Valorem, Paris, Valérie Fayard, directrice générale déléguée, Emmaüs France, Antoine Le Feuvre, directeur digital chez Suez (activité Recyclage & Valorisation),

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