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« Je n’ai rien fait » : à cause du squat de sa maison, Karine s’est retrouvée en garde-à-vue et a perdu 80 000 euros

Face à un squat inattendu, Karine voit sa maison, sa vente et sa tranquillité s’effondrer dans une bataille administrative sans fin.

Karine Lellouche, 55 ans, pensait simplement gérer la succession de son père en vendant la maison familiale située sur le Bassin d’Arcachon. Le projet a rapidement basculé dans un scénario qu’elle n’aurait jamais imaginé. Lorsqu’elle retourne sur place au printemps, elle découvre que la maison est occupée. L’homme présent s’est installé comme chez lui, transformant la situation en une affaire longue et éprouvante. Elle entame alors une procédure pour obtenir son expulsion. Mais malgré l’adoption récente de la loi anti-squat, qui a permis de multiplier les expulsions, une difficulté juridique fait tout dérailler.

La propriétaire raconte le premier choc au micro d’Europe 1 : « Je me rends compte que la maison est squattée. Il a mis des jolis petits rideaux aux fenêtres, le compteur électrique, il a même installé la fibre ». L’occupant affirme devant la gendarmerie que la maison était ouverte lorsqu’il est entré. À partir de ce moment, la procédure administrative censée permettre une expulsion accélérée n’est pas validée. « Pour eux, il n’y a pas eu d’effraction. Ils ont juste prêté foi aux paroles du squatteur, donc j’ai reçu une lettre du préfet m’indiquant que ma demande était non recevable », résume-t-elle. Le dossier reste alors suspendu, malgré son insistance.

Un tournant inattendu dans cette affaire de squat
Les semaines passent, les démarches s’enchaînent, mais rien ne bouge. Puis, à la fin du mois de septembre, la situation prend un tournant inattendu. L’occupant de la maison est agressé par deux personnes. L’affaire se retourne contre Karine, qui se retrouve à son tour convoquée et placée en garde à vue, le temps d’examiner de possibles responsabilités. « Cet individu se fait molester dans la maison. Alors, est-ce que c’est lui qui porte plainte, ou les deux personnes qui l’ont tapé se sont fait arrêter par la gendarmerie, je ne sais pas. Tout le monde a affirmé que c’était moi qui avais monté le coup, que j’avais envoyé du monde. Moi, je ne suis pas au courant, je n’ai rien fait », assure-t-elle.

L’enquête se poursuit et deux personnes sont interpellées, indique le parquet de Bordeaux. Pendant ce temps, Karine se retrouve dans une impasse. Elle ne peut ni récupérer son bien, ni le vendre dans les conditions prévues. L’occupation continue, la procédure traîne, et le temps joue contre elle. Ce qui devait être une simple vente se transforme en un enchaînement de démarches administratives, de tensions et d’incertitudes sur l’issue.

Les conséquences financières du squat
Pour sortir de cette situation, elle finit par décider de céder la maison malgré tout, à un promoteur intéressé depuis le départ. Mais cette vente ne se fait pas sans conséquence financière. « Dans la promesse de vente, il était signifié que la maison devait être libre. Le promoteur m’a imputé de la vente 80.000 euros parce que le squatteur était dans la maison », confie-t-elle. La perte est importante, et elle dit en ressentir un profond sentiment d’injustice.

Karine explique aujourd’hui être encore secouée par ces derniers mois. Elle affirme avoir tout fait dans les règles, sans jamais chercher l’affrontement. La quinquagénaire dit surtout ne pas comprendre comment une situation aussi claire à ses yeux a pu se retourner ainsi. Elle évoque une épreuve morale lourde, qui laisse un goût amer, celui d’une loi pensée pour protéger les propriétaires mais qui, dans son cas, n’a pas empêché une issue défavorable.

Un renforcement annoncé de la lutte contre le squat
À peine arrivé au ministère du Logement, Vincent Jeanbrun pose ses priorités. Sur le plateau de CNews, il affirme vouloir durcir encore l’arsenal contre l’occupation illégale de logements. Il rappelle que la loi portée en 2023 par Guillaume Kasbarian a « triplé les sanctions encourues » et instauré une « clause de résiliation de plein droit » dans les baux, accélérant les procédures en cas d’impayés. « Il y a une faille juridique, un angle mort », estime cependant le ministre, évoquant les situations où l’occupant est entré légalement dans les lieux, par un bail ou une location temporaire, mais refuse ensuite de partir. Dans ces cas-là, la procédure redevient lente, soumise notamment à la trêve hivernale.

Cette loi, assure-t-il, « a permis une grande avancée » et produit déjà « ses premiers effets ». Les associations de défense du logement dénoncent de leur côté une hausse des expulsions locatives, estimant qu’une « dérive » est en cours. Reste que le ministre souhaite aller plus loin. « Dès qu’on constate une infraction, on expulse », résume-t-il, disant vouloir travailler avec les parlementaires à un nouveau texte pour mieux protéger les propriétaires. Un sujet sensible, même si le phénomène reste limité : entre septembre 2023 et mai 2024, 432 demandes d’expulsions ont été enregistrées dans 27 préfectures, avec une concentration marquée en Île-de-France.

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