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Kevin, 17 ans, tué dans un piège mortel tendu par deux lycéens « machiavéliques »

Deux jeunes comparaissent à huis clos devant la cour d’assises des mineurs de Reims pour assassinat, accusés d’avoir fomenté un pacte « machiavélique » pour ôter la vie de Kevin Chavatte, à Mourmelon en 2018.

Il faut se souvenir de ce millier de personnes qui défila au printemps 2018 dans les rues de Mourmelon-le-Grand (Marne) pour comprendre qui était Kevin Chavatte. Un mot revient inlassablement à la bouche de ceux qui l’ont connu: « la joie de vivre incarnée. » Le jeune homme de 17 ans a été tué de 34 coups de couteau le 2 juin 2018, dans un parc à quelques centaines de mètres de son domicile. Deux de ses camarades, âgés eux aussi de 17 ans au moment des faits, sont jugés ce mardi devant la cour d’assises des mineurs de Reims pour assassinat, accusés d’avoir fomenté un pacte « machiavélique » pour lui ôter la vie.

Océane « le menait en bateau »

Ce samedi après-midi de juin, Kevin a rendez-vous avec Océane au parc du Bois-des-Soeurs, derrière l’église de Mourmelon. Avec elle, c’est « une succession de rapprochements et d’éloignements », selon le procureur, qui a depuis longtemps tourné à l’avantage de la jeune fille, décrite par l’entourage comme « manipulatrice. »

« Kevin était très attaché à elle. Mais ces derniers temps, il commençait à prendre conscience qu’il souffrait. Il disait qu’il en avait marre qu’elle le mène en bateau. Il avait décidé d’arrêter (leur relation). C’est elle qui est revenue lui parler », confiait à RMC à l’époque une amie de la victime.

Au cours de la balade, Kevin est attaqué par un individu à l’arme blanche pour un prétendu vol de sac à dos. Son agresseur ne lui laisse aucune chance. Il s’acharne sur l’adolescent au sol, le poignarde dans le dos. Océane, prostrée, assiste à la scène mais n’intervient pas. Deux témoins entendent des appels à l’aide, dont l’une qui raconte à RTL d’une voix étranglée par les sanglots, son arrivée sur la scène de crime:

« Il était couché par terre. J’explique aux pompiers ce qu’il se passe devant moi, qu’un homme n’a plus de pouls, qu’il ne respire plus, qu’il y a beaucoup de sang. Je mets mon gilet sur une plaie d’au moins 10 cm ouverte sur la gorge pour faire un point de compression. C’était horrible pour moi, il n’y avait plus de vie dans ses yeux. »

L’indignation de la classe politique

Les secours arrivent rapidement sur place et tentent de le ranimer, en vain. Océane dresse un portrait-robot de l’agresseur, un homme de « type basané », habillé en treillis militaire. Très vite, l’inquiétude gagne Mourmelon, tandis que les messages d’indignation se multiplient sur les réseaux sociaux. Des responsables politiques nationaux, droite et extrême droite en première ligne, dénoncent cette « violence qui gangrène » le pays.

Mais tout est faux. Le scénario présenté par la jeune fille est très vite mis à mal par les enquêteurs. En réalité, Océane connaît très bien l’agresseur, Adrien, qui est éperdument amoureux d’elle. Ce garçon solitaire, passionné par les armes et la Seconde Guerre mondiale est trahi par une blessure à la cuisse qu’il s’est infligée durant l’attaque.

Il avait pourtant prévu un alibi solide, en simulant un trajet de sport sur une application sportive et en publiant une photo sur son compte Facebook. Mais à son domicile, la police découvre un vêtement ensanglanté ainsi qu’un poignard. Son ADN correspond à une trace retrouvée sur la scène de crime.

Un pacte mortel fictif devenu réalité

Placé en garde à vue, Adrien nie dans un premier temps les faits, mais sa ligne de défense se brise sous le poids des preuves. Il reconnaît alors le guet-apens mortel mis en place avec Océane, organisé depuis plusieurs jours, en témoignent les nombreux échanges de messages entre les adolescents ainsi que leurs recherches respectives sur Internet. Mais il assure que c’est elle, le cerveau de l’attaque.

Selon ses dires, la lycéenne ne supportait plus l’insistance de Kevin, qui l’aurait agressée sexuellement et la harcelait sur les réseaux sociaux. Elle lui aurait donc proposé ce pacte mortel, d’abord au travers d’un jeu de rôle virtuel, pour ensuite devenir réalité. Adrien était entièrement dévoué à Océane, qui était responsable selon ses parents de ses déboires scolaires. Du fictif au réel, il a fini par céder.

« On ne lui a laissé aucune chance »

Pour la famille de la victime, les deux accusés ont la même part de responsabilité. « C’est elle le cerveau, lui c’est juste l’exécutant, le bras armé. C’est elle qui a tout organisé, tout planifié », assure à BFMTV Aurore Potard, cousine de Kevin Chavatte.

« Il y a eu un véritable acharnement. On ne lui a laissé aucune chance. Rien ne peut légitimer, permettre de comprendre. Mes clients aujourd’hui, c’est légitime, ils attendent une condamnation », nous explique Fanny Quentin, l’avocate de la famille du défunt.

Placé depuis plus d’un an en détention provisoire, Adrien a démarré un suivi psychologique. « Ce qui lui importe est d’être devant ses juges et face aux victimes, d’être dans un rapport de vérité”, indique à BFMTV son avocat, Me Mourad Benkoussa. Océane, qui comparaît libre à la suite d’un vice de procédure, encourt comme Adrien 30 ans de réclusion criminelle.

Après son baccalauréat, Kevin, brillant élève en terminal S, aurait dû démarrer des études dans une école d’art. Comme un nouveau départ loin de cette relation toxique.Esther PaoliniJournaliste BFMTV

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